mardi 24 septembre 2013

Raph et Répète


Raph et Répète se préparent pour l’école. Raph traîne devant la télé, câline son chat, fait des grimaces à son reflet dans le miroir, avale ses céréales le plus len-te-ment possible, cherche ses bas, trouve ses bas, lace ses souliers. Lace ses souliers, lace ses souliers, lace ses souliers… Qu’est-ce que maman fait?

Répète.

Raph et Répète on été avisés que le souper est prêt. Raph crie : Oui, oui j’arrive! Raph n’arrive pas. Raph se souvient soudainement qu’il doit passer à table et amorce une progression vers la cuisine. Raph voit son bâton de hockey par terre et en profite pour faire quelques tirs dans son filet imaginaire. Un but, deux, trois buts… Qu’est-ce que maman fait?


Répète. 

Raph et Répète ont des devoirs à faire. Raph gribouille dans son cahier, éguise son crayon dix fois, va à la toilette, revient de la toilette. Retourne à la toilette. Aiguise encore son crayon pour mieux gribouiller dans son cahier. Qu’est-ce que maman fait?

Répète.

Raph et Répète doivent aller au lit. Raph a soudainement envie de caca. Raph va à la toilette. Raph a ensuite affreusement soif. Raph se sert un verre d’eau. L’eau lui donne envie de pipi. Raph va à la toilette. Raph veut un câlin de maman. Raph reçoit son câlin. Raph a quelque chose à dire à maman. Raph le dit à maman. Raph a chaud, trouve la télé trop forte, est incommodé par la lumière du couloir, n’arivve pas à s’endormir et veut un dernier câlin. Qu’est-ce que maman fait?

Répète.  

Viens souper, fais tes devoirs, prépare-toi, va te coucher… Vous, en avec-vous ras-le- bol de toujours répéter?

mercredi 11 septembre 2013

(Pas) bravo monsieur Le Monde!


Depuis quelques jours, j’ai des images en tête : La petite Yéménite de 8 ans décédée au courant de sa nuit de noces. Les petits et grands enfants syriens victimes des armes chimiques. Le petit chinois dont les yeux ont été arrachés par une femme démente. Depuis quelques jours, j’ai pas le moral. Et, je me demande pourquoi. Comment voulez-vous. Je suis pas fière de notre monde. Il se fait mal là où ça fait le plus mal. Il n’aime pas ses enfants. Le monde il est pas beau. Parfois oui, mais en ce moment, je broie son noir. Pourquoi il fait mal à ses enfants? Pourquoi il fait mal, tout simplement? Naître pour martyriser et tuer, c’est possible? Mais, à quoi ça sert au juste? À procurer un sentiment de béatitude? Je ne comprends pas en quoi faire le mal, fait du bien. C’est un principe que je ne m’explique pas. Comme la plupart des gens d’ailleurs. Enfin, j’ose croire. Et, le mal, ce mal, le monde ne le fait pas qu’au-travers des actes aussi extrêmes. Il le répand jour après jour autour de lui. Sans vraiment s’en rendre compte. Enfin, j’ose croire.

Quand on lui coupe la route, il lui en veut à mort à ce connard dans l’autre voiture. Ça vient le chercher au plus profond de ses entrailles et il serait capable de la pire vengeance si ce n’était pas du fait que rouler sur ce connard pourrait endommager sa carrosserie. C’est de la haine profonde, pure et viscérale. Tout le monde a une histoire du genre à raconter et quand il s’y met, ça provoque tout un tollé. Parce que tout le monde a déjà voulu tuer un cave qui l’a dépassé par la droite. Au lieu de ça, le cave s’est vu recevoir un doigt d’honneur. Moins dommageable, mais tout aussi porteur d’agressivité.  

Pendant ce temps, nos enfants regardent.

Le monde n’aime pas qu’on le contrarie. Si le voisin a le malheur d’avoir une opinion divergente de la sienne, il l’insulte : « Ta mère aurait dû avorter! », « T’es une lopette, tu devrais te suicider! ». Ça arrive chaque jour sur les réseaux sociaux. Le monde ne défend plus ses idées, il traite les autres de tous les noms. Puis, le monde il est content de tirer sur tout ce qui ose parler. C’est si valorisant d’intimider autrui et ce n’est pas si grave puisqu’il y a un écran pour désamorcer les préjugés. 

Pendant ce temps, nos enfants voient.

J’ai vu le monde s’enflammer pour une partie de hockey de niveau atome. Atome je vous dis! Ils ont à peine dix ans et déjà on leur met autant de pression qu'en subit un urgentologue ». Heille le monde, vos jeunes ne sauvent pas des vies, ils s’amusent! Des batailles de parents dans les estrades. Ce n’est pas une légende, je l’ai vu de mes yeux vu. Je suis sortie de l’aréna aussi vite que j’y suis entrée. J’ai eu peur pour ma vie. Sérieusement. Pathétique…

Pendant ce temps, nos enfants observent.

Mon fils est souvent sur le gun, comme on dit. Dès que ça ne marche pas comme il veut, il s’énerve. Il soupire. Il se fâche. Il réplique. Il claque la porte. On dirait qu’il m’en veut. C’est dû à quoi? Son caractère ou son éducation? Je me permets de me poser la question, car on dit que les enfants apprennent par l’exemple. Lui aurais-je inculqué cette attitude caractérielle? Le monde m’aurait-il disposé à le faire? Ai-je été entraînée dans le tourbillon du ressentiment? Je fais de mon mieux, mais si ce mieux avait été abreuvé de fiel?

Je me mets en doute. Je mets le monde en doute.

S’injurier, se chamailler, s’impatienter, s’envoyer paître peuvent paraître bien loin du Yémen, de la Syrie ou de la Chine. Pourtant, il n’y a pas de frontière au mal. Ouvrez la brèche de la haine, il s'y infiltrera. Et, le pire, c’est qu’il le fera de manière insidieuse. S’entretenir dans un micro-climat de hargne, n’est pas peu banal. Je pourrais être en train de préparer un futur enragé. Le monde pourrait-être en train de préparer de futurs enragés. 

Faudrait se conscientiser un peu mieux. En tous les cas, il me semble.