mercredi 17 décembre 2014

Qu’est-ce que j’ai fait pour mériter ça?


Je suis à peu près certaine que vous vous êtes fait prendre et que vous avez pensé : Bon, voici un texte de pauvre fille qui s’apitoie sur son sort. Et bien, non, justement. Faut pas croire tout ce que l’on lit. Plutôt, il ne faut pas juger tout ce que l'on lit. Erreur commise par une grosse poignée d’utilisateurs des réseaux sociaux qui émettent des commentaires souvent dégradants et méchants à l’égard des personnages impliqués dans les histoires qu’ils n’ont même pas pris la peine de lire. Enfin, bref, le but de mon texte n’est pas de faire une critique sur ce sujet. Je veux vraiment vous parler de cette pensée qui m’a traversé l’esprit ce matin : qu’est-ce que j’ai fait pour mériter ça ?

Il y a quatre mois, j’ai mis au monde une fille magnifique, facile, en santé et tout. Qu’est-ce que j’ai fait pour mériter un tel cadeau ? Et ça, c’est sans compter mon merveilleux fils, beau comme un cœur, petit homme en devenir et en santé lui aussi. Qu’est-ce que j’ai fait pour mériter 2 cadeaux aussi extraordinaires ?

À l’opposé, ces parents affligés au lendemain d’un massacre sans nom, qu’ont-ils fait pour mériter ça ? Ces parents d’enfants tués par des sauvages qui aujourd’hui pleurent la mort de leur petit. Qu’ont-ils fait pour mériter ça ?
Une blessure à vie.

Bien sûr, il ne s’agit pas de mérite, mais on se comprend n’est-ce pas ? Pourquoi eux et pas moi ?

La loto de la vie, si on peut l’appeler ainsi. Je ne vois pas autre chose. À vue de nez, je ne trouve rien qui justifie le fait que j’ai été plus gâtée qu’eux par la vie ? J’ai de la chance. Vraiment, beaucoup de chance. Moi, ce matin, je serre dans mes bras mon bébé qui sourit au moindre guidi guidi. Moi, cet après-midi, je vais retrouver mon grand garçon qui ne manquera pas de me dire je t’aime maman. Avec lui, chaque jour suffit son je t’aime. C’est touchant.      

En cette période des fêtes, ayons de la reconnaissance pour la chance que nous avons d’être issus d’un peuple qui aime ses enfants. De vivre dans un pays où les femmes ont la liberté de porter l’enfant de l’homme qu’elles aiment sans se faire exécuter. Certains enfants sont malmenés et ce sont ceux qui restent qui en paient le plus gros prix : je n’ose pas imaginer la souffrance qu’est celle de perdre un enfant aux mains de la violence. La douleur de perdre un enfant tout court. Peu importe la manière.

Alors, je remercie le ciel (Même si ce dernier divise les peuples) d’être bon pour moi. Je lui demande de continuer à l’être et d’en faire autant pour tous ceux qui n’ont pas mérité leur sort.

Avant de terminer, faites-vous du bien et écoutez la plus belle chanson de Noël de tous les temps, Happy Xmas de John Lennon.


Aimez vos enfants et passez de joyeuses fêtes.  

mercredi 12 novembre 2014

Tant qu'il y aura nos enfants


Voilà deux jours que je n’ai pas mis le nez dehors pour cause de température moche et de tâches à accomplir dans la maison. Ceci dit, deux jours à n’avoir que sa petite personne avec qui faire la conversation, ça en fait du temps pour penser.

 
Être en tête-à-tête avec soi-même apporte son lot de questions. Le congé de maternité est tout indiqué pour faire marcher le petit hamster dans sa tête. Surtout quand on se remet en question professionnellement, qu’on se demande si on aura de quoi payer l’hypothèque dans quelques mois, qu’on craint de ne pas avoir de gardienne le temps venu de retourner au boulot (que je n’ai pas).

 

 
Parmi mes amies, je compte des mamans qui ont des postes vraiment gros dans des compagnies vraiment grosses. D’autres qui, en plus de s’occuper de leurs trois enfants, se rendent au travail cinq jours semaines et bossent pour une entreprise personnelle ou enseignent les soirs de semaine. Il y en a certaines qui ont démarré leur petite compagnie : parties de rien, elles s’accomplissent à merveille et vivent très bien de leur réussite. Franchement les amies, j’ai envie de vous dire tout simplement bravo ! Vous n’avez pas idée à quel point je vous trouve hot parce que voyez-vous, je commence déjà à craindre mon retour au travail.

 
Pour tout vous avouer, entre ma fille dont je dois m’occuper, le chien à dompter, le hockey et les devoirs de Raph, les courses, la préparation des repas, l’entretien de la maison, je me sens beaucoup plus utile à la maison qu’au travail.

 
Mais il y a un mais. En fait il y en a deux : l’argent et l’ennui. Oui, car il faut le dire, ça peut être long une journée complète à la maison. Je suis sûre que mes amies en congé de maternité peuvent en témoigner. Cela m’a donc amenée à me demander pourquoi on tient tant à passer un an à la maison. Enfin, il me semble qu’on y tient, non ? Moi j’y tenais, et j’y tiens encore, là n’est pas la question. Toutefois, j’admets que quand mon fils rentre de l’école, je me sens déjà moi seule.

 
D’ailleurs, cet après-midi, en l’apercevant par la fenêtre revenir de l’école, j’ai réalisé que Le Monde selon Raph allait devenir de moins en moins naif : mon bébé est devenu un petit homme qui marche avec assurance vers de plus en plus d’autonomie. Il était si beau à voir.

 
Soudain, un gazouillement s’est fait entendre. J’ai tourné les yeux vers Marilie jolie. Elle venait tout juste de se réveiller. Elle m’a souri. Rien n’est plus beau qu’un sourire de bébé. Rien.

 
À ce moment-là, j’ai compris pourquoi on tenait tant à notre congé d’un an : ces petits moments sont irremplaçables. Il faut les capter tandis qu’ils nous saisissent.

 
Alors, je me suis dit : relaxe Nancy, tout ira pour le mieux. La job, l’argent, le ménage, les repas, les devoirs, les obligations. Tant qu’il y aura tes enfants pour t’émouvoir, tout ira pour le mieux.

      

mercredi 24 septembre 2014

Hello Marilie !


D’aussi loin que je me souvienne, Raph a toujours voulu avoir un petit frère ou une petite sœur. J’avais longtemps pensé que jamais je ne pourrais lui offrir cette immense joie. Il y avait le temps qui s’égrainait et, surtout, aucun homme avec qui fabriquer un autre petit bout de bonheur.

 

La vie est remplie de surprises.    

 

Cela aura pris 10 ans et quelques poussières pour que le vœu de Raph se réalise.  

 

Marilie a commencé à changer nos vies par un beau vendredi soir de la fin août 2014. On revenait d’aller faire des courses en famille. On s’apprêtait à manger des bonnes côtes-levées en famille. Elle nous a signifié que c’était le moment pour elle de se joindre à notre cercle.

 

C’est amusant de voir la gueule des gars quand ils assistent aux premières manifestations d’un accouchement imminent. Si vous aviez vu l’étonnement dans les yeux de mes hommes au moment où mes eaux ont crevé. Et, si vous aviez vu ma tronche à moi : on aurait cru qu’il s’agissait de ma première fois. Faut dire qu’après tant d’années, le corps et l’esprit ont tendance à oublier.

 

Cependant, le cœur a la mémoire longue. Même si la question peut sembler ingrate, au cours de ma grossesse, je me suis demandé s’il était possible de ressentir des sentiments aussi forts pour son deuxième enfant que son premier. Que voulez-vous, les hormones nous font croire toutes sortes de choses.

 

Et, les hormones sont souvent dans le champ.

 

Ma fille, je l’ai aimée instantanément. Et, depuis qu’elle est là, je l’aime un peu plus chaque jour. Puis, si je me fie aux étincelles dans les yeux de son papa et de son grand frère, c’est pareil pour eux.

 

Marilie a changé nos vies le 30 août 2014 à 6h19 précisément. Bienvenue, petite Marie !
 
        

vendredi 15 août 2014

C'est pas une raison pour se faire mal


« La guerre, la guerre, c’est pas une raison pour se faire mal ».

 

Hier soir, juste avant de s’endormir, mon fils a laisser couler une réflexion similaire à celle lancée par l’un des jumeaux Leroux dans la Guerre des Tuques :

 

« Être malheureux, c’est pas une raison pour se tuer »

 

Toute la vérité et la naïveté du monde inspirées par le suicide de Robin Williams.

 

Comment explique-t-on à un enfant de 10 ans qu’une personne s’enlève la vie?

 

« Maman, pourquoi il s’est tué le Monsieur ? »

 

Parce qu’il ne pouvait plus supporter ses souffrances.

 

Mais, mon fils a pourtant bien raison : ce  n’est pas une raison pour se tuer. Bien sûr, c’est facile à dire quand on ne ressent pas la détresse de ces gens qui décident d’en finir avec leurs jours. Pourtant, le malheur et la souffrance font partie de la vie. Et, tandis que j’écris ces lignes, je réalise que cela va presque de soi : le malheur et la souffrance font partie de la vie. Alors, pourquoi ne pas mettre fin à cette dernière, tout simplement ?

Justement, c’est trop simple. Il me semble.

 

Toutes ces opportunités ratées. Mais, évidemment, quand on est assaillis par la douleur, on ne les voit plus.

 

Pour ma part, je n’ai jamais, ne serait-ce qu’une seconde, songé à mettre fin à mes jours. Je présume que je peux me considérer chanceuse. J’ai probablement été épargnée. Cependant, cela n’a pas empêché la vie de me faire passer par des moments difficiles.

 

Ce matin, l’été avait un air d’automne. Cette saison souvent associée à la morosité. Toutefois, j’avais le cœur joyeux en repensant aux paroles de mon fils. Je me disais que si je m’étais laissé abattre, aujourd'hui je n’en serais pas à l’aube d’une aventure grandiose. Dans à peine quelques semaines, Marilie fera partie de nos vies.

 

Ce cadeau, je le dois à une personne qui m’a été envoyée il y a de cela 5 ans.

 

Non, Raph, être malheureux n’est pas une raison pour se tuer. Et, je souhaite de tout mon cœur que cette lumière brille toujours en toi. Sache que même si tu as un trou dans ta mitaine, un jour ou l’autre, il y aura forcément une personne pour poser sa main sur ton épaule en disant :

 

« T’as d’la neige ici »…

 

Alors là, tu auras tout chaud dans ton petit cœur. 
 
 

 

       

lundi 9 juin 2014

La grande déception

Séduire. Plaire. À tous. Absolument. Parfois, fléchir sous le poids de cette quête effrénée.

L’inaccessible étoile.

Une salle. 200 personnes. Des invités de marque.

Une scène. Moi. Que moi.

Je me sens petite. Vulnérable. Mise à l’épreuve.

S’il fallait que je déçoive ces fameux invités de marque, soit les personnes les plus importantes de ma vie : mon fils, mon amoureux, ma famille, ma belle amie et bébé à venir.

La peur de décevoir s’intensifie en devenant parent. Lire le mépris dans les yeux de sa progéniture : la blessure assassine.

S’ajoutent à cela la peur de déranger, de causer de l’inconfort aux gens de mon entourage. Éprouver leurs malaises. Porter à bout de bras leur inconstance. Croire que j’en suis responsable. Que j’en suis la source.    

Ça fait beaucoup d’appréhensions pour une seule et même personne.

Ce sont d’ailleurs ces appréhensions qui m’ont poussée, il y a un peu plus d’un an, à faire quelque chose pour moi : prendre des cours de chant. Hier, j’ai participé au spectacle de fin d’année. Au moment de livrer ma prestation, je me suis mise à penser à tout le monde, excepté à moi. Dans ma tête, les visages défilaient :

Ce qu’il reste de nous un vélo abîmé;
Ce qu’il reste de nous des rapports tendus;
Ce qu’il reste de nous plusieurs coups de téléphone;
Ce qu’il reste de nous tes 50 ans du mois passé;
Ce qu’il reste de nous un bébé à venir;
Ce qu’il reste de nous une amitié profonde;
Ce qu’il reste de nous de l’incompréhesion…

J’ai cassé ma voix.


Je n’ai pas la prétention de croire que je possède une grande voix, mais toutes ces émotions mélangées ont eu raison d’elle. Et, dans sa tête d’enfant, Raph s’attendait à voir sa maman telle une diva. Il a été déçu. Il me l’a dit. Ça m’a blessée. Il a regretté. Ça m’a quand même blessée.

Ce qui devait arriver, arriva. J’ai ressenti le mépris de ma progéniture. Et bébé à venir en a pensé quoi ? Et mon amoureux ? Et maman, papa, grand frère, belle amie ?

Au fond, la question que je devrais me poser est : qu’est-ce que moi jen ai pensé ? L'opinion des autres avant la mienne. Et, voilà que pour cela, je vis une grande déception au lendemain de ce concert. À cause de qui exactement ? Par ma faute. J’ai oublié de m’amuser. À la place, j’ai pensé à mon amoureux qui était en train de rater son match de hockey afin d’assister à mon spectacle. J’ai stressé pour mes parents qui se remettaient de la soirée des 75 ans de mon père, fête célébrée la veille à la maison et à l’occasion de laquelle j’avais préparé un grand souper pour 15 personnes, dans l’espoir que tout le monde s’amuse. Mais, il n’y a rien de parfait… Je me suis aussi tracassée pour mon fils qui devait commencer à trouver le spectacle un peu long. 

Et maintenant, je fais quoi ? J’ai une leçon à tirer de cette expérience et j’en ai probablement une à donner à mon fils. À première vue, je serais portée à lui conseiller de ne jamais s’oublier. Il serait grand temps que je fasse de même d’ici l’arrivée de bébé. 


Telle est ma quête.

lundi 26 mai 2014

Merci voyous !

Les histoires moches en attirent parfois des jolies.

Vendredi dernier, la mésaventure de Raph et son vélo a pris un nouveau sens. À priori, ça s’annonçait préoccupant : le lendemain du vol, on a retrouvé le vélo dans un buisson près de l’école en très piteux état. J’ai alors cru à l’hypothèse du taxage.

J’étais inquiète.

Mais, l’école n’a fait ni une, ni deux et a trouvé des réponses : des jeunes du secondaire ont joué les malins en vandalisant le vélo.

Pas d’intimidation, juste des petits cons.

Ce fut un soulagement pour l’esprit, mais pas pour le porte-monnaie : il fallait acheter un nouveau vélo.

Vendredi dernier, une âme généreuse a croisé la route de mon fils. Comme ça, sans rien demander, simplement par dévouement, un bénévole de l’école a réparé le vélo de Raph tout à fait gratuitement. En moins d’un avant-midi, mon fils a eu droit à un vélo remis à neuf et une belle leçon d’altruisme.

Vous allez peut-être me trouver bizarre, mais je pense que de temps à autre, il est nécessaire de remercier les abrutis.  

Alors, merci voyous d'avoir posé votre stupide geste. Vous avez complètement raté votre coup et provoqué une bonne occasion de démontrer que le bien fait de grandes choses en regard du mal.

Et, je m’en voudrais de ne pas remercier du fond du cœur cet homme anonyme qui a redonné le sourire à un jeune garçon qui s'est senti comme un gros con à cause de toute cette histoire.

Ce matin, Raph a fièrement enfourché son vélo en déclarant : « C’est un deuxième essai, maman ! ».


Il avait l’air confiant. 

Maman aussi.

jeudi 22 mai 2014

Raph qui roule… Plus!

Hier, c’était un de ces soirs où l’on se couche avec des sentiments partagés :

« Si j’attrape ce p’tit morveux là ou ce grand tarla là, il va passer un mauvais quart d’heure ».

« Pauvre Raph, comment il a dû se sentir. Sa fierté en a certainement pris un coup ».

Entre colère et tristesse.

Quelqu’un a eu le culot de voler le vélo d’un petit bonhomme de 10 ans, tout fier de prendre de l’autonomie et de pédaler jusqu’à l’école pour la toute première fois.

J’imagine le visage déconfit de fiston devant le rack à bicyks… Son bicyk en moins. 

Ça m’a fait mal à mon petit coeur de maman.

L’a-t-il mal attaché? A-t-il été victime d’un p'tit vite qui a su déjouer le code de son cadenas? Pire, l’a-t-on sommé de donner sa bicyclette, sans quoi on allait lui faire du mal.

Ma petite tête de maman s’est posé toutes sortes de questions.

Mon hypothèse à moi? Un petit malfaisant a profité de la situaiton, quellle qu’elle soit, pour partir avec le vélo, qui, d’ailleurs, n’était pas tout neuf ni tout beau. Pourtant, il doit bien y avoir un adulte qui en a eu connaissance, en l’occurrence, un parent, non?

Et, c’est ça qui me dégoûte au plus haut point. Ce parent, dont le rôle est d’éduquer et de faire de son enfant un bon citoyen devrait intervenir et prendre les mesures nécessaires afin que son enfant répare son méfait. Mais non, au lieu de cela, le parent se dit : "Chouette, je n’aurai pas à acheter un vélo!". Bon, ok, j’extrapole peut-être un peu, beaucoup, mais je suis profondément choquée.

Raph n’en n’est pas à son premier objet perdu jamais retrouvé. Un moment donné, je me dis que ça n’a aucun sens : si les parents intervenaient, les choses seraient retournées. Tous les jours je regarde dans le bac des objets perdus de l’école, mais c’est peine perdue…

J’aimerais dire à ce parent voleur de vélo par procuration que son geste n’est pas banal. Non seulement il a dérobé la bicyclette d’un enfant, mais il a blessé son estime de lui. Hier soir, avant de s’endormir, voilà qu’elles ont été les paroles de Raph :

« Maman, je pense que je suis un gros con »…

Des mots plus ruineux qu’un vélo …



mercredi 30 avril 2014

Bon voyage Loulou!

Loulou, née Whippet, est décédée le 29 avril 2014.

« Maman, on dirait que ça me fait pas tant que ça quelque chose. Ben, un peu là, mais pas tant que ça ».

Je peux comprendre, fiston. Tu n’as pas connu les meilleures années de Loulou. En fait, elles se sont probablement éteintes le jour où tu es rentré dans la maison. Pas qu’elle ne t’aimait pas. Elle n’aimait juste pas ton manque de délicatesse. Déjà, à 5 mois, tu lui tirais les moustaches et lui arrachais d’énormes touffes de poils. Sa belle fourrure blanche immaculée. Qu’est-ce qu’elle était belle ma Loulou!

Elle en a enduré des choses ma belle Loulou. À commencer par toi. Et, que dire de Cassonade et Charlotte qui lui ont réservé un accueil mitigé le jour où elle est devenue ma chatte. Elle, elle voulait simplement jouer avec eux. Pas eux. Ils voulaient la manger. Ils avaient adopté une stratégie de guet selon laquelle un félin se postait à un coin de l’appartement et l’autre, complètement à l’opposé. Juste devant les plats de bouffe. Pour pas qu’elle bouffe leur bouffe.  

Puis, elle a passé une année de sa vie à me voir brailler quasiment tous les jours. Ça, c’était à l’époque où toi et moi on s’est retrouvés seuls avec notre petit bonheur, rue Chambord. Elle l’a cherché pendant quelques jours ton papa.

Ensuite, ça été le déménagement. Les mouvements de corps, les chats, n’aiment pas trop. Mais Loulou, elle, elle n'aimait encore plus "pas trop ça" que la moyenne des chats. Elle gueulait tellement dans l’auto que tu t’es mis de la partie et t’as braillé, voire hurlé avec elle. Et là, un moment donné, y’a eu cette odeur immonde : elle s’est pissée dessus. De blanc, elle est passée à jaune. Eurk!

Enfin, Loulou a coulé quelques années de calme dans notre nouvel appartement. Elle s’y est faite et je pouvais ressentir son bien-être quand au beau milieu de la nuit, croyant que le tonnere s’était levé, je réalisais que Loulou ronronnait de satisfaction : c’était pas un chat, c’était un tank qui dormait avec moi.

Son repas préféré était le thon. Dès qu’elle entendait l’ouvre-boîte, elle réclamait son dû. Et, si j’avais le malheur de ne pas lui en donner –parce que j’avais ouvert une canne d’ananas- et ben, elle en avait pour des heures à bouder. Elle n’a jamais compris le principe selon lequel il y a autre chose que le thon qui vient en conserve. C’est de même un chat, ça comprend rien à rien. Et, Loulou ne faisait pas exception à la règle. Elle était conne.

Mais, tsé, une belle conne. Attachante en plus. Pis cute à souhait. Tous les visiteurs s’exclamaient devant sa prodigieuse beauté. Mais s’ils avaient le malheur de la prendre sans son consentement, elle se crispait, prenait panique et essayait de se déprendre de son ravisseur comme s’il venait de la martyriser à mort. Pas à l’aise pentoute dans les bras d’un étranger. Même pas dans les miens. Encore moins dans les tiens, Raph.   

À l’été 2010, on a emménagé dans le logement du bas du duplex qu'on occupait, et oncle Daniel a posé ses pénates dans le nôtre. Le drame toi! Pourtant, Loulou avait maintenant accès au jardin. Mais, les fleurs pis les moineaux, c’était pas trop son truc. Elle préférait de loin le sofa et le bois franc. Au-travers tout ça, le cycle de la vie a fait son œuvre : Charlotte nous avait quittés quelques mois avant le déménagement et ensuite, Cassonade. Là, Loulou était ben. Vraiment bien. C’était la reine de l’appartement. Mais, son règne fût de très courte durée. On lui a imposé Couscous. La nouvelle venue lui sautait sur la tête, mordait sa queue, l’emmerdait à fond la caisse!

Un jour, celui que tu appelles affectueusement Maxou, est venu vivre avec nous. Pis Léo. Son chat. Une autre affaire… On ne saurait dire si c’est à cause du caractère bouillant de Loulou, mais Léo a fugué après seulement quelques jours. Faut dire qu’elle n’était pas commode quand elle s’y mettait la vieille. Oui, car il faut l'admettre, avec le temps, Loulou est devenue une vraie mégère. Les années commençaient à faire leur œuvre : moins de patience, moins d’endurance.

Depuis quelques mois, Loulou semblait un peu mal en point. Elle marchait avec difficulté. Elle s’endormait partout, le dos recourbé, les poils moins lustrés. Souvent, on se disait qu’il fallait en finir avec sa souffrance. Et, quand on était décidés à la libérer, elle s’accordait un sursis : elle retrouvait de la vigueur et trouvait l’énergie nécessaire pour terroriser Elgros, le chat de monocle Daniel, qui s'aventurait chez nous.

Samedi dernier, Bosko est entré dans nos vies. Un mignon chiot absolument fou quand il voit un chat. Soit il les aime trop. Ou pas du tout. On ne sait pas encore très bien, on apprend à se connaître et on commence à peine à décoder nos langages respectifs. En tant qu’humains, on pense que Bosko veut jouer avec les chats. Les chats, en tant que chats, pensent qu’ils vont se faire tuer. Y’a comme une zone grise.   

Comme Loulou semblait nous dire qu’elle avait encore envie de sa vie, on avait décidé d’attendre de voir sa réaction vis-à-vis du bébé chien. 

Elle a été radicale et sans équivoque.

Loulou, née Whippet, est décédée le 29 avril 2014. À moi, ça m’a fait quelque chose de la voir partir. De la trouver inanimée dans un coin de ma chambre, après tout ce que nous avons vécu en 12 ans. 

J’espère que malgré tout ce que je t’ai fait endurer Loulou, tu as aimé ta vie de chat un peu folle avec moi. Envoie-nous toute ton énergie pour nous aider à notre tour, à endurer notre nouveau pensionnaire. Ton départ et son arrivée secouent un peu la maisonnée cette semaine. Mais, comme tu l’as si bien démontré tout au long de ta petite vie, on s’habitue à tout.   

Bon voyage Loulou!