jeudi 27 août 2015

Redevenir petit


Redevenir petit. Voilà ce à quoi devra se préparer mon fils en vue de l’an prochain. Cette année, il est le plus grand de son école. Raph est un finissant du primaire. Dieu que le temps passe vite. En 6ème année, on peut un peu se la jouer et user d’un tantinet d’arrogance pour impressionner les plus jeunes. Bien que ce soit chien, c’est légal. Et sain. Qui n’a jamais fait les fanfarons dans son enfance, histoire de se donner de la confiance et de la crédibilité. C’est peut-être une manière inconscience d’oublier, qu’avant longtemps, on ne pourra plus se prendre pour un autre. À la grande école, on prend une débarque dans la hiérarchie.


Même chose quand on est en recherche d’emploi. On redevient petit, il me semble. Et, quand on se fait demander sur un ton quasi méprisant si on a fait une demande d’aide-sociale, on se sent tout petit, tout petit. Bon, j’exagère certainement pour le mépris, mais dans ma tête, ça eu l’effet d’un marteau piqueur. Je me suis d’ailleurs empressée de rétorquer qu’il ne s’agissait que d’une question de semaines, voire de jours avant que je ne trouve un emploi. Mais, si ce n’était pas le cas. Et s’il était encore loin le jour où je décrocherai un job ? Je me sens comme un tit-cul qui entre au secondaire.


Pendant longtemps, j’ai joué dans la cour des grands. La récréation a duré 16 ans. J’ai d’abord eu un travail qui fascinait ben du monde : « Ha ouais, tu travailles à la radio, ça doit être cool ça ?! ». Dans ce temps-là, j’aurais pu faire comme les plus vieux du primaire et en mettre plein la vue aux gens qui m’enviaient. Entre nous, j’avoue qu’il m’est arrivée de le faire, surtout à mes débuts : qui ne se venterait pas d’avoir pris l’ascenseur avec Charles Aznavour ou de se refaire une beauté devant le même miroir que Mitsou ? Mais, ça a fini par me passer et j’ai commencé à trouver ces choses-là normales. Ça y est, juste de penser comme ça, ça me paraît prétentieux : « Ha, vous comprenez, j’en ai eu marre de croiser des vedettes à cœur de jour », dit-elle en envoyant son écharpe derrière son épaule. 
En réalité, un jour j’ai eu envie de me déstabiliser. J’ai osé sortir de ma zone de confort de 14 années pour changer d’air. Ma galère a durée deux ans. Ensuite, il y a eu la merveilleuse arrivée de bébé puis maintenant, plus rien. Mon congé de  maternité est terminé et mon statut enviable envolé. Retour à la case zéro, comme on dit.


J’ai le sentiment que ces jours-ci, c’est dans l’air. Après Mademoiselle divague et son baise-en-ville et Geneviève Pettersen et son syndrome de l’imposteur, voilà que c’est à mon tour de manquer cruellement de confiance en moi. Il faut dire qu’ à force d’encaisser les refus, on perd ses repères et on désespère. Je dois tout de même me ressaisir : je n’ai pas passé des centaines d’entrevues et il y a des plans qui se dessinent. Ce n’est qu’une question de temps. Pourtant, plus il avance celui-là, plus je recule. Je veux dire, j’hésite, comme pour ce projet de roman qui est en train de s’effriter tranquillement.


En situation précaire, la vulnérabilité s’en donne à cœur joie. Tout le monde croit en ton talent, sauf toi. Alors, t’as besoin de te faire un ami petit comme toi pour ne pas te laisser intimider par les plus grands. Certes, des amis, j’en ai. Mais, dans la même condition que moi, pas présentement. Et, parce que je les aime, des amis comme moi, je n’en veux pas en ce moment.


Profite de ta dernière année de grand, fiston. C’est tough de redevenir petit. Par contre, sache qu’on finit toujours par redevenir grand. C’est ta petite maman qui te le dit.

mardi 18 août 2015

De l'amour pour tout le monde


Dernièrement, mon fils et moi avions une conversation à propos de son papa. Je ne sais plus trop à quel sujet, mais toujours est-il qu’à un certain moment, voyant l’enthousiasme de Raph, je lui ai dit : « Tu l’aimes ton papa, hein ? ». D’emblée, il a répondu : « Oui, mais je t’aime aussi, maman. ».

 

Cela m’a fait réfléchir sur le fait que les enfants de parents séparés ressentent souvent un conflit de loyauté et ce, même si papa et maman n’ont jamais culpabilisé l’enfant.

 

Le week-end dernier, mon fils devait partir chez son papa dimanche matin. Seulement, le samedi, en fin de journée, il a manifesté le désir de s’y rendre le soir même. Il disait s’ennuyer. Raph a senti le besoin de me rassurer et de se faire rassurer : « T’es sûre maman que ça ne te dérange pas ? Tu comprends, ça fait longtemps que je n’ai pas vu papa, mais si tu préfères que je reste, je resterai ». Sa réaction m’a rendu triste. On ne peut pas se sentir coupable d’une situation dont nous ne sommes pas responsables. Encore moins quand on est un enfant.

 

Mon fils n’a jamais demandé à avoir des parents qui ne vivent pas ensemble. Or, j’estime que dans la mesure du possible, ce sont à nous, ses parents, de lui éviter de souffrir à cause de cela. Évidemment, tout n’est jamais tout à fait noir, ni tout à fait blanc et il y a les situations inévitables. Par exemple, on ne peut séparer fiston en deux lors des fêtes de fin d’année. Conséquence : une année sur deux, Raph ne peut suivre maman, beau-papa et petite sœur à la campagne, où nous avons l’habitude de célébrer la nouvelle année. Or, Raph est chaque fois un peu peiné. Mais, il semblerait qu’une nouvelle tradition est en train de s’installer avec papa, soit celle de partir sous les tropiques à cette période de l’année. Disons qu’il n’est pas en reste le beau Raph !

 

Ce qui est bien quand les deux parents séparés arrivent à s’entendre - pour le bien de leur enfant et le leur aussi, car entretenir de la hargne envers une personne si proche est épuisant et inutile- c’est qu’on peut faire des compromis. Le papa de Raph et moi acceptons régulièrement de prolonger ou raccourcir un séjour chez l’un ou chez l’autre afin de permettre à ce dernier de profiter d’une fête familiale ou tout simplement, parce que c’est ce dont Raph a envie.

 

Tout ça pour te dire, mon fils, que de l’amour tu as le droit d’en avoir pour tout le monde et que tu n’as pas à te ranger dans un camp ou dans l’autre. Nous formons une grande famille recomposée où tu n’as jamais à te sentir redevant envers qui que ce soit. Tant et aussi longtemps que ta naïveté d’enfant t’habitera, ta seule responsabilité consistera à exprimer tes émotions afin que nous, les adultes qui t’entourons, puissions veiller sur ton bonheur.

 

À l’heure actuelle, tu patauges dans l’océan avec ton papa. Je n’ai pas encore eu la chance de t’emmener en voyage par avion, mais cela ne nous a pas empêchés d’avoir des vacances vraiment bien jusqu’à présent. D’ailleurs, je tiens à te remercier, car tu démontres toujours une grande joie lorsque nous partons à l’aventure, même si c’est seulement à quelques heures de route. Tu as ce don, toi aussi, de ne pas culpabiliser tes parents en accueillant à bras ouverts ce qu’ils ont de mieux à t’offrir. Cela démontre que tu es un jeune homme sensible et vraiment intelligent.

 

Profite bien de ta semaine, car déjà, jeudi prochain, ce sera la rentrée. Ta dernière année au primaire… Dieu que le temps passe vite quand on est entouré d’amour de part et d’autre !    
 
 

mercredi 1 juillet 2015

Avec le temps, va, tout revient !


C’était il y a trois mois… Déjà. Le temps passe si vite. Peut-être parce qu’il est incontournable. En fait, le temps, c’est la vie. Le temps arrange les choses. Le temps, c’est de l’argent. Le temps adoucit les mœurs. Le temps, on le tue, on le fait passer. On passe du bon temps. On se rappelle du bon vieux temps. Le temps, on voudrait parfois l’arrêter. On court souvent après lui, car il nous manque. Le temps fait son œuvre. De temps en temps, il joue contre nous. Le temps est parfois sale ou au beau fixe. Et, comme chantait Léo Ferré, avec le temps, va, tout s’en va.

 

            En ce qui me concerne, dernièrement, le temps m’a permis de me ravigoter. Au moment d’écrire la fin de l’innocence, les temps étaient durs. Si bien que je croyais que Raph avait cessé de m’inspirer. J’étais tellement prise par ma peine, que je ne voyais plus le garçon émerveillé qu’il est. Certes, il n’écarquille plus les yeux devant une glace au chocolat, mais il s’étonne avec intérêt quand il apprend que l’un des hommes les plus forts de tous les temps était un Québécois. Tout ce qui relate des records de vitesse, longévité, poids, etc impressionne Raph au plus haut point.  

 

            C’est tout à fait normal que les intérêts de mon fils changent. Le temps le fait vieillir, n’est-ce pas ? Cette prise de conscience m’amène à dire que le temps fait évoluer les choses. Rien n’est statique, tout est en mouvement. Or, depuis mon épisode orageux (je vous ai menti en vous faisant croire que j’allais bien), je m’efforce d’accepter que les choses ne se passent pas toujours comme on le voudrait. J’ai fait la paix avec l’idée selon laquelle Raph devient un ado puisque cela ne signifie pas pour autant que le meilleur est derrière nous. Je me relève aussi tranquillement de mon épreuve et je mets l’accent sur aujourd’hui et demain. En somme, j’apprends à essayer à lâcher prise. Je dis bien essayer, puisque ce n’est pas tous les jours facile. Seul le temps pansera la blessure et seul lui connaît la suite.

 

            Donc, j’aurai encore et toujours des histoires à raconter à propos de mon fils. J’ai compris que ça ne dépendait pas de lui, mais bien de moi. Comme j’ai compris que ce n’est pas la raison de la crise qui est importante, mais la manière dont je choisis de la gérer. Ceci dit, je ne veux en rien l’amenuiser -puisqu’elle était bien réelle et blessante- mais je m’efforce de laisser derrière moi ce qu’il ne pourra être changé de toute manière. Il ne sert à rien de vivre dans le regret de nos enfants qui grandissent et qui ne sont plus des bébés, comme il ne sert à rien de revenir constamment sur le passé. Chaque stade de la vie de nos enfants est une merveille. Chaque pardon que nous accordons est une occasion de saisir le bonheur.

 

Le bonheur est précieux, devant lui, ne baisse pas les bras au moindre coup de froid. Tente plutôt de le soigner et tu ne cesseras jamais de t’émerveiller des moments heureux. Voilà ce que j’ai envie de dire à mon merveilleux ado en devenir.   

jeudi 2 avril 2015

La fin de l'innocence


Depuis décembre dernier, je n’ai rien eu à écrire sur les pages du Monde selon Raph. J’y ai souvent pensé, mais je n’ai rien trouvé. Pas que fiston ait été sur le neutre tout ce temps-là, mais il n’y avait rien d’assez convaincant pour me pousser à sortir le clavier. Cela m’amène à me poser certaines questions. C’est lui qui n’est plus inspirant (Ce serait plutôt étonnant) ou c’est moi qui ne suis plus inspirée ? Est-ce un mélange des deux ou encore l’arrivée de bébé qui expliquerait ce silence ?

 

Il suffit parfois d’un tout petit rien -ou d’un grand coup de poing en pleine gueule/coeur- pour perdre ses illusions. J’en sais tellement quelque chose, mais bon, ça c’est une autre histoire. Or, si je m’en tiens à Raph, force est d’admettre qu’il n’est plus l’enfant émerveillé, mais tout aussi merveilleux, qu’il a déjà été. Peu à peu, il devient un ado et il lui faut plus qu’une glace au chocolat pour voir ses yeux s’écarquiller. À moins que je ne sois plus aussi sensible à ses élans d’enfant ?

 

Moi aussi je vieillis. Ces jours-ci, je m’en rends particulièrement compte. J’encaisse les épreuves différemment. Ne partez pas en peur, je ne nage pas en pleine déprime, mais vous savez, les vicissitudes de la vie... Pourtant, je suis plus zen que je ne l’aurais été 10 ans auparavant. Je suis capable de faire la part des choses et de regarder les problèmes plus lucidement.

 

En est-il de même pour Raph ? Je veux dire, aborde-t-il ses problèmes d’enfant plus rationnellement ? Ce qui expliquerait pourquoi j’ai moins d’histoire de crises de bacon dans l’allée du supermarché à raconter ou moins de phrases embarrassantes du genre : « Maman, est-ce que la madame est folle ? » à partager.

 

D’histoire en histoire, j’ai compris que le prince charmant n’existe que dans les contes de fée. Raph a-t-il compris que jamais un super héros ne viendra le défendre dans la cours d’école ?          

 

J’ai aussi appris que les relations sont en mouvement. Des gens viennent et vont dans notre vie selon l’époque. Quant à Raph, sait-il déjà que le jour n’est pas si loin où il ne verra plus ses petits copains du primaire ?

 

À 41 ans, je sais plus que jamais que la confiance se mérite, le mensonge est laid, l’intégrité paie toujours et le manque de loyauté blesse. À 11 ans, Raph connaît maintenant la différence entre le bien et le mal. Il a appris qu’il doit assumer ses erreurs, demander pardon et pardonner en retour.

 

Serait-ce la fin de l’innocence ? J’en sais trop rien. Quoi qu’il en soit, j’ignore combien de temps encore le Monde selon Raph restera silencieux. En est-il aux mots de la fin ? Peut-être, à moins que cette naïveté qui s’effrite lentement ne cède sa place à d’autres histoires… À surveiller bientôt peut-être dans un blogue près de chez vous : Mari-l’innocence. J